Des ambroisies en Ariège : plantes exotiques envahissantes qui peuvent être dangereuses pour la santé …

ParCarole Herscovici

Des ambroisies en Ariège : plantes exotiques envahissantes qui peuvent être dangereuses pour la santé …

Bien qu’elles fassent beaucoup parler d’elles, notamment dans la vallée du Rhône où elles sont responsables de graves problèmes sanitaires auprès d’une partie de la population, les ambroisies sont des plantes encore mal connues en Ariège. Si quelques stations avaient été repérées il y a une dizaine d’années, leur présence n’avait, semble t-‘il, pas donné lieu à des actions ou publications auprès du public. En 2015, un projet sur les plantes exotiques envahissantes, mené au niveau régional avec l’URCPIE et le CBPMP, fait un zoom sur ces espèces, puis dans un deuxième temps, sensibilisation, information et formation seront proposées auprès du grand public, des collectivités concernées et des professionnels

Mais tout d’abord, qui sont les ambroisies ? Les ambroisies présentes en France sont représentées par 4 à 5 espèces dont deux concernent plus particulièrement l’Ariège : l’ambroisie à feuilles d’armoise, Ambroisia artemissiifolia (cf : photo en haut de l’article), arrivée en France vers la fin du 19e siècle en provenance du Canada avec des semences, considérée autrefois comme plante médicinale au même titre que l’ambroisie maritime plus méditerranéenne et l’ambroisie trifide, Ambroisia trifida, une espèce de grande taille qui envahit progressivement de nombreuses cultures.

Ces plantes invasives ont un impact négatif important sur la santé de nos concitoyens à cause de leurs grands effets allergisants (rhinites, asthme …).

Ces 2 ambroisies ont déjà fait l’objet de recherches qui ont donné lieu à des enquêtes et des prospections notamment en Ariège où des stations de ces 2 espèces avaient été repérées.

Quel était le projet ? Dans le projet 2015 sur les espèces exotiques envahissantes, mené par l’Ana, il a été prévu de mettre à jour les données réalisées sur ces espèces, en allant vérifier, dans un premier temps sur les Communautés de communes de Pamiers et Saverdun, que sur toutes les stations repérées il y a quelques années, les ambroisies prospèrent toujours et à découvrir de nouvelles stations. Suite à un appel lancé auprès des adhérents du groupe botanique de l’Ana, 2 personnes se sont beaucoup investies dans ce travail et ont été ponctuellement aidées par une personne en service civique dans la structure.

Les zones les plus favorables au développement des ambroisies qui avaient été repérées concernaient surtout le canton de Saverdun avec notamment les communes de Montaut et de Mazères pour l’ambroisie trifide et une zone plus étendue allant de Belpech à Mirepoix pour l’ambroisie à feuilles d’armoise. Pour certaines des anciennes stations repérées, on n’a pu retrouver la présence d’ambroisies, en particulier au Carlaret et à Trémoulet sur une parcelle cultivée. La prospection a vraiment débuté lorsque nous avons pu enfin voir les 2 espèces autrement qu’en photo.

Les premières ambroisies trifides ont été vues le long d’une culture de maïs sur Montaut ce qui a orienté très rapidement nos recherches aux abords des cultures irriguées principalement. Cette espèce, qui peut atteindre 3 à 5 m de haut dans de très bonnes conditions a pu être repérée avec l’arrivée du mois d’août puis le début de la floraison.

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Photo d’Ambroisie trifide.

A la mi-septembre, une dizaine de nouvelles stations étaient repérées en plus des anciennes. La population pouvait varier de quelques pieds à des concentrations de plusieurs centaines de plants souvent éparpillées en quelques points très denses où il était difficile de faire un comptage précis. Cette ambroisie a pu être rencontrée dans du maïs, du sorgho, du tournesol ou plus souvent des céréales déjà récoltées.

L’ambroisie trifide est l’espèce qui cause actuellement le plus de problème dans les cultures à cause de son grand développement et de son extension importante. Elle est un peu comparable à celle du datura.

Cette année les prospections ont démarré en juillet ce qui est vraisemblablement un peu tôt car les ambroisies ne sont pas encore adultes, donc plus difficilement repérables et le nombre de pieds augmente en fin de saison.

En ce qui concerne la seconde espèce, l’ambroisie à feuille d’armoise, nos recherches se sont orientées tout d’abord dans la vallée de l’Hers puisque la première station que l’on nous a indiquée se trouvait sur un bras mort de la rivière et que, plus en aval, une ancienne station observée à Belpech était également sur les bords de l’Hers. Il semblait donc, à première vue, que les 2 espèces se développaient dans des conditions écologiques différentes : les cultures ou les bords de cours d’eau.

En orientant rapidement les prospections tout au long de la vallée de l’Hers, notamment sur les bancs de graviers ou de galets, quand ils étaient accessibles, nous nous sommes vite aperçus que l’ambroisie à feuille d’armoise avait réussi à s’établir un peu partout, en plus ou moins grande quantité, mais toujours aux endroits où le plan d’eau était proche de la surface. Ainsi, de Mirepoix à Calmont, nous avons trouvé de loin en loin des colonies d’ambroisies même si elles ont pu être un peu chahutées avec les grandes inondations qui ont modifié le cours de la rivière.

On compte une douzaine de nouvelles stations répertoriées en 2015. Sur cette partie de la vallée de l’Hers, on ne rencontre aucune ambroisie dans les cultures irriguées qui la bordent.

Au cours de la première quinzaine de septembre, la vision idéale de cette ambroisie qui restait cantonnée dans le lit d’une rivière a volé un peu en éclats : en effet, dans la région de Mirepoix, les anciennes stations à visiter ont révélé que l’ambroisie à feuilles d’armoise était capable de prospérer et d’envahir les cultures et ses abords. Ainsi dans une grande zone de cultures de tournesol, et en compagnie du datura, nous avons pu observer des centaines de pieds. Le sol étant assez sec, les plantes sont plus courtes mais fleurissent quand même. Les pieds, enchevêtrés les uns dans les autres, ne permettent que de faire une estimation car les écarter pour les compter serait long et enverrait des nuages de pollen sur l’observateur.

Deux autres points sur Mirepoix (le long d’un chemin près d’une culture de maïs et près de la déchetterie) ont montré que cette espèce pouvait coloniser et survivre dans des milieux plus secs, des friches ou des endroits où les terres ont été retournées ou déposées.

D’après les observations récoltées, il est difficile à ce jour de savoir si les ambroisies rencontrées ont pu se reproduire végétativement. On constate toutefois qu’une tige récoltée et placée dans un bocal d’eau peut émettre en quelques semaines un chevelu de racines impressionnant. Il est à noter aussi que les 2 espèces d’ambroisies n’ont jamais été rencontrées ensemble dans un même lieu.

 

En conclusion, nous pensons que les prospections 2015 ont permis d’avoir une vue plus précise sur l’envahissement des milieux agricoles ariégeois par ces 2 espèces.

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Localisation des stations d’Ambroisie sur les territoires des Communautés de communes de Saverdun et Pamiers, 2015

Il serait bien de compléter ce travail par des enquêtes chez les agriculteurs pour avoir des renseignements plus précis et suivre peut être une ou deux stations de chaque espèce pour voir comment évolue la population au fil des années…

En 2016, le programme sur les plantes exotiques envahissantes va continuer ; notamment sur les communautés de communes de Pamiers et Saverdun, avec un zoom important sur les ambroisies. Outre les prospections qui vont être poursuivies, nous allons sensibiliser et informer le grand public et mobiliser les collectivités et les professionnels concernés (agriculteurs, professionnels de santé, agents entretien espaces verts, bords de routes …). Au programme : expos, stands, sorties, émission de radio, article dans la presse …..

Plaquette Ambroisies en Ariège

Hervé Duval et Fabienne Bernard

À propos de l’auteur

Carole Herscovici